L’œuf s’offre aux folles et trompe

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« Chérie je te quitte, je pars avec la pou-belle. » Un bon mari doit savoir, le lundi venu, aller au travail en faisant bien sursauter sa chère et tendre. Une bonne épouse doit alors gicler de la salle de bains et s’avancer en peignoir dans le couloir avec, au bout de ses yeux flamboyants, une seule question : « Tu pars avec qui ? » Et ça marche aussi en sens inverse : « Chéri je te quitte, je pars avec la poubelle. » Si le gars ne se coupe pas en se rasant… « Elle est jolie, au moins ? » demandera-t-il tout en galopant pour ne rien rater du spectacle. Bien des gouttes d’eau finiront sur le parquet, et la serviette de Mon-sieur tombera de ses hanches, révélant un désolant paquet frippé, vision fort indiquée pour commencer la semaine avec une bonne envie de tout transformer en hachis Parmentier.

Prenez les œufs, par exemple. Il y a toujours cette espèce de bulle au sommet lors-qu’on les fait durcir. On croit bien faire en débutant leur écaillage par ce côté-là et tout ce qu’on y gagne, c’est un douloureux éclat de coquille sous l’ongle du pouce. C’est pourquoi le Pentateuque ordonne de tout faire en omelette. La chasse au fragment rebelle tombé dans le bol visqueux vous aura des allures d’aventures dans les mers du sud, de combat homérique contre un calamar géant. En outre, du reste, et même en plus n’oublions pas, ainsi ne jetterez-vous que de grandes coquilles encore enveloppées d’un peu d’albumine, ce qui est très bon pour le teint de la pou-belle, amen. Et comme cela votre conjoint pourra vous tromper avec icelle tout en ayant le corrodant sentiment d’être un zéro. Elle est pas belle, la vie?

ALLAN ERWAN BERGER

Poème à retrouver en recueil en suivant ce lien

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